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                                                  COUR SUPRÊME DU CANADA

 

 

Référence : Dickie c. Dickie, [2007] 1 R.C.S. 346, 2007 CSC 8

 

Date :  20070209

Dossier :  31350

 

Entre :

Leaka Helena Delia Dickie

Appelante

et

Kenneth Earle Dickie

Intimé

‑ et ‑

Fonds d’action et d’éducation juridiques pour les femmes

Intervenant

 

Traduction française officielle

 

Coram :  La juge en chef McLachlin et les juges Bastarache, Binnie, LeBel, Deschamps, Fish, Abella, Charron et Rothstein

 

 

Motifs de jugement :

(par. 1 à 7)

 

La Cour

 

______________________________


Dickie c. Dickie, [2007] 1 R.C.S. 346, 2007 CSC 8

 

Leaka Helena Delia Dickie                                                                            Appelante

 

c.

 

Kenneth Earle Dickie                                                                                            Intimé

 

et

 

Fonds d’action et d’éducation juridiques pour les femmes                         Intervenant

 

Répertorié : Dickie c. Dickie

 

Référence neutre : 2007 CSC 8.

 

No du greffe : 31350.

 

2007 : 17 janvier; 2007 : 9 février.

 

Présents : La juge en chef McLachlin et les juges Bastarache, Binnie, LeBel, Deschamps, Fish, Abella, Charron et Rothstein.

 

en appel de la cour d’appel de l’ontario

 


Tribunaux — Compétence — Exécution forcée des ordonnances — Ordonnance pour outrage — Époux déclaré coupable d’outrage au tribunal pour avoir omis de garantir ses obligations alimentaires au moyen d’une lettre de crédit irrévocable et de déposer un cautionnement pour dépens — Juge des motions ayant compétence pour prononcer une condamnation pour outrage du fait qu’aucune des ordonnances de garantie n’enjoignait à une personne « de payer une somme d’argent » au sens de la règle 60.11 des Règles de procédure civile, R.R.O. 1990, Règl. 194.

 

Tribunaux — Cours d’appel — Compétence — Époux déclaré coupable d’outrage au tribunal pour avoir omis de garantir ses obligations alimentaires au moyen d’une lettre de crédit irrévocable et de déposer un cautionnement pour dépens — Époux interjetant appel contre cette condamnation devant la Cour d’appel — La Cour d’appel aurait eu le pouvoir discrétionnaire de refuser d’entendre l’appel, compte tenu du dossier démontrant que l’époux persistait à désobéir aux ordonnances — Question préliminaire concernant la compétence de la Cour d’appel devenue théorique.

 

Arrêt : Le pourvoi est accueilli.

 

Lois et règlements cités

 

Loi sur les tribunaux judiciaires, L.R.O. 1990, ch. C.43, art. 140.

 

Règles de procédure civile, R.R.O. 1990, Règl. 194, règle 60.11.

 

POURVOI contre un arrêt de la Cour d’appel de l’Ontario (les juges Laskin, Sharpe et Juriansz) (2006), 78 O.R. (3d) 1, 262 D.L.R. (4th) 622, 206 O.A.C. 257, 22 C.P.C. (6th) 36, [2006] O.J. No. 95 (QL), qui a infirmé une décision de la juge Stewart (2004), 1 R.F.L. (6th) 167.  Pourvoi accueilli.


Harold Niman, David Stratas et Daryl L. Gelgoot, pour l’appelante.

 

Rochelle F. Cantor et Marie‑France Major, pour l’intimé.

 

E. Llana Nakonechny et Gillian Calder, pour l’intervenant.

 

Version française du jugement rendu par

 

1                                   La Cour — L’intimé, Kenneth Earle Dickie, a été déclaré coupable d’outrage au tribunal pour non‑respect d’ordonnances judiciaires lui enjoignant de garantir ses obligations alimentaires en fournissant une lettre de crédit irrévocable et en déposant un cautionnement pour dépens.  La juge des motions lui a infligé, pour cet outrage, une peine de 45 jours d’incarcération ((2004), 1 R.F.L. (6th) 167) que le Dr Dickie a purgée immédiatement.  Celui‑ci a ensuite poursuivi son appel contre sa condamnation pour outrage au tribunal devant la Cour d’appel de l’Ontario, soutenant que la juge des motions n’avait pas compétence pour le condamner pour outrage en vertu de la règle 60.11 des Règles de procédure civile, R.R.O. 1990, Règl. 194, parce que les ordonnances sous‑jacentes lui enjoignaient de « payer une somme d’argent ».  Il a en outre allégué ne pas avoir bénéficié de l’équité procédurale.

 

2                                   L’appelante, Leaka Helena Delia Dickie, a invoqué à titre préliminaire la compétence conférée à la Cour d’appel par l’art. 140 de la Loi sur les tribunaux judiciaires, L.R.O. 1990, ch. C.43, lui demandant de refuser d’entendre l’appel du Dr Dickie parce qu’il continuait à transgresser, non seulement les ordonnances de garantie à l’origine de la condamnation pour outrage, mais aussi les ordonnances alimentaires sous‑jacentes.


 

3                                   La Cour d’appel a rejeté, à la majorité, la motion préliminaire de Mme Dickie, jugeant que l’argument du Dr Dickie selon lequel la cour n’avait pas compétence pour le déclarer coupable d’outrage au tribunal justifiait l’audition de l’appel ((2006), 78 O.R. (3d) 1).  La cour a accueilli l’appel du Dr Dickie et annulé la condamnation pour outrage, statuant que la règle 60.11 des Règles de procédure civile ne pouvait être utilisée pour obtenir l’exécution forcée d’aucune des deux ordonnances de garantie car il s’agissait d’ordonnances enjoignant à une personne de « payer une somme d’argent ».  La cour a accordé des dépens de 15 000 $ au Dr Dickie.

 

4                                   Le juge Laskin, dissident, estimait que la cour avait le pouvoir discrétionnaire de refuser d’entendre l’appel du Dr Dickie et qu’elle aurait dû l’exercer, compte tenu du dossier démontrant que le Dr Dickie persistait à désobéir aux ordonnances.  Par conséquent, il était d’avis de suspendre l’appel du Dr Dickie jusqu’à ce que celui‑ci ait pris des mesures pour se conformer aux ordonnances de la  juridiction inférieure.  Toutefois, en supposant que la cour ait pris la bonne décision en acceptant d’entendre l’appel, le juge Laskin estimait que l’appel du Dr Dickie aurait dû être rejeté parce que, selon lui, aucune des ordonnances de garantie ne constituait une ordonnance enjoignant à une personne de « payer une somme d’argent » au sens de la règle 60.11 et le Dr Dickie avait bénéficié de l’équité procédurale.

 

5                                   Madame Dickie se pourvoit maintenant devant notre Cour.

 


6                                   Nous sommes d’avis que la Cour d’appel avait le pouvoir de refuser d’entendre l’appel du Dr Dickie et que, si elle avait exercé son pouvoir discrétionnaire comme le proposait le juge Laskin, pour les motifs qu’il a exprimés, nous n’aurions eu aucun motif d’intervenir quant au résultat.  Néanmoins, la Cour d’appel ayant exercé son pouvoir discrétionnaire autrement et ayant entendu l’appel, cette question préliminaire est devenue théorique. 

 

7                                   En ce qui concerne l’appel de la décision sur l’outrage au tribunal, nous partageons pour l’essentiel l’opinion du juge Laskin.  En conséquence, le pourvoi est accueilli, l’ordonnance de la Cour d’appel est annulée, l’appel du Dr Dickie contre sa condamnation pour outrage est rejeté et l’ordonnance de la juge des motions est rétablie.  Madame Dickie aura droit à ses dépens devant notre Cour sur la base procureur‑client, et devant la Cour d’appel sur une base d’indemnisation substantielle.

 

Pourvoi accueilli avec dépens.

 

Procureurs de l’appelante : Niman Zemans Gelgoot, Toronto.

 

Procureur de l’intimé : Rochelle F. Cantor, Toronto.

 

Procureur de l’intervenant : Fonds d’action et d’éducation juridiques pour les femmes, Toronto.

 

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